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Le brigadier Frédéric.

que ces choses auxquelles je ne faisais pas attention, me paraissent belles aujourd’hui, dans cette mansarde.

C’était notre dernier printemps à la maison forestière.

Marie-Rose, chaque matin, en petite jupe, son fichu bien propre croisé sous les bras, descendait au jardin avec sa corbeille et le vieux couteau terreux, pour cueillir les premiers légumes. Elle relevait, en passant, la bordure de buis des petites allées et rattachait à leur piquet les brindilles défaites de nos rosiers. Je voyais de loin Jean Merlin s’avancer d’un bon pas dans le sentier de la prairie, longeant les vieux saules ; je l’entendais crier :

a Marie-Rose ! »

Aussitôt elle se redressait, se dépêchant d’aller à sa rencontre. Ils s’embrassaient et revenaient tout riants, bras dessus, bras dessous. J’étais content, je me disais :

« Ils s’aiment bien… Ce sont de braves enfants ! »

La grand’mère Anne, presque toujours enfermée dans sa chambre, regardait aussi, penchée dans la petite fenêtre entourée de lierre, les