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Mais moi, qui vais tenter l’élément infidèle,
Moi, qui fuis le rivage et n’entends plus ta voix ;
Courbant mon pavillon, arrêtant ma nacelle,
Je te salue au loin pour la dernière fois.

Adieu, Toi que j’aimai ! mon ame solitaire
Retrouvait, pour ses chants, un écho dans ton cœur.
S’éloigner d’un ami, c’est quitter le bonheur :
Adieu ! je serai seul maintenant sur la terre.

Peut-être quelque jour (et ce sont là mes vœux),
Quand la jeunesse aura, de sa main inconstante,
Sur ton front innocent bruni tes blonds cheveux,
Ta nef retrouvera ma nacelle flottante.

Lors, rien ne pourra plus désunir nos amours,
Mais, comme l’alcyon sur des écueils sauvages,
Nous bâtirons un nid, au milieu des orages,
Pour y couler en paix le reste de nos jours.

Lors, du bonheur pour toi si la source est tarie,
Si ton cœur veut gémir ou prier en ce lieu,
Tu trouveras toujours, dans mon âme attendrie,
Des pleurs pour mes amis et des chants pour mon dieu.