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de lui-même lorsque l’heure de la manifestation est arrivée.

Nous n’entendons pas dire qu’avant Gall on n’eût émis dans le monde aucune de ses idées sur le siège des facultés de l’âme[1] ; mais autre chose est en science le pressentiment vague d’une découverte, et cette découverte elle-même arrivée à l’état de démonstration. Gall eût perdu plus de temps à réunir les opinions de ses devanciers sur cette matière qu’il n’en mit à les inventer dans son esprit ; et encore, vu l’état imparfait de ces données diffuses, n’eût-il guère fait que rassembler des ténèbres. Il prit donc délibérément la seule route qu’il avait à prendre, celle de l’examen et de l’intuition. Son principal soin fut même d’isoler son jugement des lectures qui auraient pu l’influencer. Gall se fit de cette solitude morale une règle de conduite ; il sut ignorer ce qu’on avait dit et fait avant lui, quitte à rechercher plus tard, quand ses forces seraient épuisées, les témoignages des anciens en rapport avec sa doctrine. Jusque-là, le seul ouvrage qu’il eût sans cesse sous les yeux fut le livre

  1. J’ai recueilli et publié ailleurs des extraits d’anciens ouvrages, qui ont préludé de siècle en siècle à la physiologie moderne du cerveau : « L’âme de l’homme, dit Christian Molderanius, étant douée d’un grand nombre de facultés, il fallait lui donner un domicile plus vaste qu’à celle des autres animaux, et qui contînt plus d’instrumens, idque pluribus contineri instrumentis. » Goglenius, auteur d’un livre sur la physionomie, affirme qu’une tête absolument trop petite, comme celle de l’autruche, annonce un être idiot, et étranger à toute conception : « Caput valde parvum quisquis habuerit, is ab omni erit sensu humanoque captu alienior. » Le rapport entre les formes du crâne et les diverses facultés de l’esprit avait été de même l’objet de recherches assidues. On peut consulter les rapprochemens que j’ai établis entre ces diverses citations et le système de Gall.