Page:Esquiros - Paris ou les sciences, tome 1.djvu/314

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penchans désespérés. Les imbéciles, les hydrocéphales étaient les objets de ses plus chères études. Il aimait à rapprocher l’organisation des hommes à grands talens de l’organisation des hommes bornés et à faire jaillir la lumière de ces contrastes irritans. Les faits recueillis par lui devenaient chaque jour plus nombreux et fournissaient une ample matière à ses réflexions. Son état de médecin le servit beaucoup pour descendre dans le cœur de l’homme et y surprendre les sentimens les plus cachés. Un médecin est un confesseur qui reçoit l’aveu des faiblesses de notre nature. Son ministère est comme le sacerdoce de la science. Fort de nos infirmités, il obtient des plus impénétrables, à certains momens, une confiance sans bornes. Le médecin suit l’homme depuis le berceau, il le voit à nu dans toute sa vie : qui a jamais songé à se draper devant son médecin ? Il le voit surtout luttant contre la mort. C’est autour du lit funèbre que Gall, à demi penché sur l’éternité, aimait à chercher dans les mourans quelques analogies entre leur caractère révélé par un dernier mot, un dernier regard, et la conformation mystérieuse de leur tête. Gall avait encore recours à d’autres moyens pour faire parler la nature ; il conviait chez lui des hommes de la dernière classe, des cochers de fiacres, des commissionnaires, des portefaix, des charretiers. Une fois à table, il n’avait point de peine à gagner leur confiance en leur donnant de l’argent et en leur faisant distribuer du vin et de la bière. Ces hommes buvaient avec entraînement ; quand Gall les jugeait suffisamment disposés à la franchise, il les engageait à lui dire tout ce qu’ils savaient