Page:Esquiros - Paris ou les sciences, tome 1.djvu/396

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tant qu’hommes, ils sont tous différens par les moyens d’action qui leur ont été départis. L’ensemble des facultés est circonscrit d’avance dans chaque individu, au point juste où Dieu a voulu l’arrêter. Gall ajoutait, au grand scandale du monde savant, que cette destination particulière à chacun était inscrite en caractères visibles sur la boîte osseuse du cerveau. Le crâne était, aux yeux du docteur allemand, un blason sur lequel la nature a marqué de sa main puissante les quartiers de noblesse de tous ses enfans. Cette noblesse-là est indélébile, car elle vient de Dieu et elle va à la société qui ne pourrait jamais subsister sans elle. C’est la variété nécessaire à l’unité de la race humaine.

Avant le docteur Gall, on avait coutume d’appliquer aux hommes connus par des œuvres d’art les termes vagues de talent et de génie. Notre novateur enseigna que le talent et le génie se modifiaient eux-mêmes selon la nature des impressions. Tel homme est né artiste : mais l’absence entière des facultés réflectives le condamne à n’exprimer, durant toute sa vie, que la forme extérieure des objets ; tel autre est né penseur, mais l’extrême faiblesse des organes de relation le rend incapable de revêtir ses idées avec les images du monde sensible ; ce sera un de ces esprits obscurs, arides et nus dont le style refuse toujours de condescendre à l’imagination de ses lecteurs. Les dispositions de l’esprit les plus heureuses peuvent être comme suspendues dans leur activité par les moindres lacunes du système cérébral. Celui-ci semble né en même temps poète par les sens et poète par l’esprit ; il pourrait