Page:Esquiros - Paris ou les sciences, tome 1.djvu/58

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mouler sur la forme de la société. L’ancienne Université sité était irrévocablement détruite, il s’agissait de créer un autre corps enseignant : la révolution était appelée à renouveler l’univers moral aussi bien que le monde politique » Les principes ne manquaient pas à cette œuvre ; mais les hommes, où les chercher ? « Existe-t-il en France, disait Lakanal, existe-t-il en Europe, existe-t-il dans le monde deux ou trois cents hommes (et il nous en faudrait davantage) en état d’instruire ? » Ces hommes, la Convention les inventa ; elle dit qu’une école soit, et une école fut. Dans ces établissemens, ce n’était pas les sciences qu’on devait apprendre, mais l’art de les enseigner. On y appela tous les savans et les littérateurs les plus distingués ; la Convention leur fit entendre que les hommes de génie étaient les premiers maîtres d’école d’un peuple. On avait senti le besoin de commencer par en haut la régénération des études. A la fondation de l’École normale succéda bientôt l’établissement des écoles centrales et des écoles primaires. Aujourd’hui que ces temps d’orage se sont éloignés, nous avons peine à retenir notre admiration devant de semblables monumens élevés à intelligence humaine. « Pour la première fois sur la terre, s’écriait Lakanal, auteur du rapport sur la création de l’École normale, la nature, la justice, la vérité, la raison et la philosophie, vont donc avoir un séminaire ! »

L’ignorance n’avait pas d’ennemi plus implacable et plus acharné que Lakanal ; sa haine contre l’ancien régime prenait sa source dans l’amour qu’il portait aux lumières. Un ministre s’était flatté que bientôt en France on n’imprimerait plus que des almanachs ; un