Page:Etienne-Gabriel Morelly - Code De La Nature.djvu/57

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Objection.

Quand on vous accorderait, disent-ils, que la politique et la morale s’y sont fort mal pris pour remédier à nos maux, sera-t-il moins vrai de soutenir que leur impuissance vient moins de leur propre fonds, que de la mauvaise volonté des hommes, qui naissent avec des penchants vicieux qu’il faut réprimer par la violence ?

Voyez, par exemple, deux enfants ; à peine discernent-ils les objets, que vous apercevez en eux un esprit de contention, de dispute, de mutinerie, d’impatience et d’obstination : l’un, quoique déjà pourvu de ce que ses cris vous ont averti qu’il désirait, veut encore avoir ce que vous venez de donner à un autre : on voit souvent ces débiles automates se disputer, avec colère et emportement, un chétif amusement. Funeste présage de leur future férocité, de leur future discorde !

Réponse.

Je réponds, premièrement, que les enfants n’étant alors pourvus d’un instinct guère plus raffiné que celui de certains animaux qu’on apprivoise, n’ont, non plus que ces animaux, que des accès momentanés de colère, que des sujets passagers de discorde, causés par un sentiment prompt et vif de quelque besoin ou de quelque inquiétude, qui les met quelquefois en concurrence pour la possession d’une même chose ; mais ces sortes de dissensions, de querelles de peu de durée qui naissent entre les brutes de même espèce, sont pour elles, en général, de