Page:Eugène Le Roy - Jacquou le Croquant.djvu/247

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— Comment le trouves-tu, ce levraut ?

— Pas mal, pour ce que j’en veux faire !

Le lendemain, le curé Bonal suivit toutes les maisons de la commune pour faire ses adieux à chacun, entrant dans les terres pour parler aux gens qui étaient au travail, et n’oubliant personne, riches ou pauvres. Le soir, il rentra fatigué, regarda tristement le presbytère vide, et s’en fut souper et coucher chez le chevalier.

À ce que me raconta la Toinette, ce fut un triste souper, aucun des trois n’étant de goût de manger.

— Ce qui me console dans ce malheur, disait le curé, c’est que je sais que mes pauvres n’en pâtiront pas, mon bon chevalier, et que vous et mademoiselle Hermine me remplacerez dignement.

— Mon pauvre curé, oui, je tâcherai de vous remplacer en ce qui regarde la charité matérielle ; mais pour ce qui est des consolations morales, de ces bonnes paroles qui aident les malheureux à porter patiemment leurs peines, de ces exhortations charitables aux fins de relever les faibles… qui vous remplacera ? Moi, je sens bien ce qu’il faudrait dire, mais je ne sais pas trouver les paroles…

— Alors, dit le curé, je suis sûr que mademoiselle Hermine me remplacera à cet égard.

— Certes, fit-elle, je ferai de bonne volonté tout ce que je pourrai…

Et ils restèrent silencieux, les braves cœurs.