Page:Eugène Le Roy - Jacquou le Croquant.djvu/29

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se tenaient tranquilles à l’abri. Le temps était toujours dur ; un aigre vent de bise faisait poudroyer la neige sur la campagne ensevelie et coupait la figure : je rentrai vite m’asseoir dans le coin du foyer.

— Nous irons à la messe, mère ? demandai-je.

— Non, mon petit, il fait trop méchant temps, et puis nous y avons été cette nuit.

Je m’ennuyai bientôt de ne rien faire et de ne pouvoir sortir, car la maison, basse et délabrée, n’était guère plaisante. Il n’y avait qu’une chambre, pas bien grande encore, qui servait de cuisine et de tout, comme c’est assez l’ordinaire dans les anciennes métairies de notre pays. On n’y voyait guère non plus, car il n’y avait qu’un petit fenestrou fermant par un contrevent sans vitres, de manière que, lorsqu’il faisait mauvais temps et qu’il était clos, la clarté ne venait qu’un petit peu au-dessus de la porte et par la cheminée large et basse. Joint à ça que les murs décrépis étaient sales, et le plancher du grenier tout noirci par la fumée, ce qui n’était pas pour y faire voir plus clair.

Dans un coin, touchant la cheminée, était le grand lit de grossière menuiserie où nous couchions tous trois ; et au pied du lit, à des chevilles plantées dans le mur, pendaient quelques méchantes hardes. Du côté opposé, il y avait un mauvais cabinet tout troué par les vers, auquel il manquait un tiroir, et dont un pied pourri était remplacé par une pierre plate. Dans le