Page:Eugène Le Roy - Jacquou le Croquant.djvu/332

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

tion, pensai-je, et, l’espoir me revenant, je me mis à crier. Mais en même temps la rumeur cessa, les pas s’assourdirent dans l’éloignement, et je retombai dans le silence de mort qui m’enveloppait depuis ma descente au fond de ce tombeau. Écrasé par le désespoir, je m’affaissai sur le sol ; les horreurs du lieu disparurent de ma pensée torturée, la tête me tourna et je m’évanouis.

Une douleur aiguë à la joue me réveilla, et, y portant la main, je sentis quelque chose qui lâcha prise et s’enfuit, tandis que, le long de mon corps, j’avais la sensation de semblables choses qui s’enfuyaient aussi, effarouchées par mes mouvements.

Et alors j’eus l’explication des trous que j’avais trouvés dans le sol de l’oubliette : c’était des anciens terriers de rats. Ces animaux qui foisonnaient, énormes, dans les vieilles murailles des douves, avaient creusé des souterrains au-dessous des fondations de la tour, et, avec ce terrible flair qui perce les murs les plus épais, sentant une proie, accouraient affamés. L’épouvantable certitude d’être dévoré à demi vivant par ces dégoûtantes bêtes acheva de m’affoler. J’essayai de me casser la tête contre les murs, mais j’étais incapable de me tenir debout, et plus encore, de prendre l’élan nécessaire. Alors je pensai aux cordes qui m’avaient lié, et, les cherchant à tâtons dans ces ténèbres horribles, je parvins péniblement à les retrouver après de longues