Page:Eugène Le Roy - Jacquou le Croquant.djvu/344

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toujours suant, toujours ahanant, comptant pour rien, et méprisé par la gent riche.

Quand j’eus fini mon oraison, je demandai :

— Maintenant, parlez. Votre sort est entre vos mains, il ne faut que vouloir. Êtes-vous bien décidés à vous venger du brigand de Nansac ? à jeter bas sa malfaisante puissance ? à vous débarrasser pour toujours de cette famille de loups ?

— Oui ! oui ! dirent-ils tous d’une voix sourde.

— C’est très bien !

Et alors, les faisant tourner tous vers le château de l’Herm, je les fis jurer à l’antique manière de nos ancêtres, comme ma mère m’avait fait jurer jadis. Tous comme moi crachèrent dans leur main droite et, après y avoir tracé une croix avec le premier doigt de la main gauche, la tendirent ouverte en disant à demi-voix après moi :

— À bas les Nansac !

— C’est bien, mes amis ; et maintenant, que chacun se tienne prêt. Une de ces nuits, quand le moment sera bon, lorsque vous entendrez trois coups de corne secs et espacés, suivis d’un autre coup prolongé, arrivez tous vitement ici : la vengeance sera proche et notre délivrance sera sous notre main !

Là-dessus, la foule se dispersa dans les bois et chacun s’en revint dans son village.

Un jeune drole de Prisse, adroit et hardi, guettait le château et me tenait au courant de ce qui