Page:Eugène Le Roy - L’Ennemi de la mort.djvu/101

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Franchissant le seuil, Daniel reconnut l’adjoint ; celui-ci lui présenta une escabelle devant le feu que tisonnait avec son bâton un vieux assis dans le coin de l’âtre. En même temps qu’il devisait avec son hôte et lui demandait divers renseignements touchant le nombre des étangs, celui des métayers, des propriétaires résidants ou forains, le docteur examinait cette demeure composée d’une grande pièce longue. À un bout, deux lits à ciel étaient placés face à face, sur un plancher grossier qui s’arrêtait à leur pied ; en deçà, partout la terre battue.

Le gaillard joignait à son industrie de sourcier celle de braconnier, comme en témoignaient un long fusil au manteau de la cheminée et un chien briquet endormi dans un coin. Il y ajoutait encore celle de cabaretier, attestée par le brandon de pin, et celle de regrattier, indiquée par un étalage à l’autre bout de la pièce, où se voyaient, près d’un petit fenestrou, un coffre à sel, et au-dessus, des chandelles de résine accrochées à une planche sur laquelle étaient placés deux ou trois morceaux de savon et quelques paquets de chènevottes soufrées.

Vis-à-vis de cette petite installation s’ouvrait dans le mur en torchis un grand trou noir d’où venait une odeur d’écurie.

Après avoir répondu aux questions de son visiteur, l’adjoint lui avoua que, ne sachant pas écrire, il laissait les papiers de la mairie chez une vieille demoiselle, ci-devant récollette à Mussidan, qui faisait les écritures.

— Mais qui signe ? demanda le docteur.

— Moi : j’ai appris à me signer.

À ce moment, l’âne passa la tête par le trou et se mit à braire.