Page:Eugène Le Roy - L’Ennemi de la mort.djvu/172

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docteur arrivait en vue de Chantors, sur les hautes collines boisées, le soleil déborda, envoyant à travers les cépées ses joyeux rais d’or.

Au creux du petit vallon, le moulin, baigné dans une légère buée, semblait encore endormi sous sa tuilée moussue. La porte et les contrevents étaient clos et la basse-cour déserte. La grande roue à palettes restait immobile contre le mur tapissé de capillaires et de scolopendres qui allongeaient leurs langues étroites au-dessus de la fosse où elle plongeait. Du bief bordé de joncs, d’iris jaunes, de soucis aquatiques et de viornes dont les bouquets de fleurs blanches faisaient déjà mine de s’épanouir, les eaux tombaient le long de l’écluse avec un bruissement monotone, coupé par le sifflement d’un merle qui jasait dans le fourré voisin.

Au bruit des pas de la jument, la bourrique se mit à braire dans son étable, et bientôt parut la Cadette, ouvrant la porte du logis ; puis elle se planta sur le seuil en se frottant les yeux du revers de la main. Ce fut tout juste si, encore ensommeillée, elle se dérangea pour laisser passer le docteur et murmura un vague bonjour.

Entrant alors dans la chambre, Daniel fut saisi par un air chaud, épais, nauséabond, que rendait encore plus désagréable le contraste avec l’air pur du dehors. Son premier soin fut d’ouvrir le fénestrou pour aérer, puis il s’avança vers le lit de Sylvia qui souleva ses paupières et balbutia péniblement quelques mots inintelligibles. La maladie paraissait suivre son cours régulier, avec une légère aggravation des symptômes défavorables. Après un examen attentif, le docteur prépara une potion et la fit avaler à la petite. Ensuite, prenant une chemise et des draps dans le paquet