Page:Eugène Le Roy - L’Ennemi de la mort.djvu/327

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— Va, ma petite, lui répondit-il en l’embrassant, il y a plus de gens allant à pied qu’à cheval !

Il était souvent dehors maintenant. Tourmenté de sa situation, il s’efforçait de trouver les ressources nécessaires pour se libérer. Il allait aux foires, aux marchés d’alentour, causait avec les notaires, avec les gens d’affaires, avec les propriétaires réputés pour avoir de l’argent. Partout l’accueil était froid, réservé. On savait le docteur Charbonnière hors d’état de payer ses dettes sans vendre la moitié de son bien, et, connaissant les créanciers impitoyables qu’il devait contenter, chacun attendait l’expropriation pour tâcher d’acquérir telle ou telle part à vil prix, à la barre du tribunal.

À Sainte-Aulaye, le marchand de bois qu’il était allé voir, n’ignorant pas qu’il était pressé, multiplia les difficultés, déprécia les coupes, et finalement, réduisit de six cents francs ses offres primitives. En sortant de là, le docteur rencontra M. Durier, le notaire de madame de Bretout, qui lui rappela poliment la prochaine échéance de son obligation et la nécessité de la rembourser. Cette coïncidence fut désagréable au débiteur ; toutefois il fit bonne contenance et répondit au notaire :

— Je tâcherai d’être prêt…

Il repartit vers le soir, et son bâton à la main, il cheminait seul, écœuré des viles actions que l’intérêt fait commettre et des tristes compositions de conscience qu’inspire la cupidité. Comme il arrivait sur les hauteurs de Servanches, il fut distrait de ses pensées par le magnifique spectacle qui s’offrait à ses yeux.

À l’Ouest, derrière les coteaux boisés, le soleil était près de tomber sous l’horizon. Dans un ciel