Page:Eugène Le Roy - L’Ennemi de la mort.djvu/359

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Et puis ils sortiraient tous de ce pays funeste, où elle craignait toujours pour lui et les enfants.

— Sylvia, repartit Daniel, il ne faut point médire de l’état de travailleur de terre : c’est le plus ancien, le plus nécessaire de tous, et, si l’on y regarde bien, le plus sain, celui qui déforme le moins l’homme en son esprit et en son corps. L’argent que tu dis, il vaudrait donc peut-être mieux l’employer à l’achat de ce pré et de ces terres qui sont à vendre par delà nos taillis. Mais nous n’en sommes pas là : si je ne me trompe, je ne suis pas près de toucher ce que me redoit ma chère cousine. Quand je l’aurai ensaché, nous verrons. Pour ce qui est de tes craintes, tranquillise-toi : elles sont vaines. L’arrestation des vingt-deux scélérats qui en prison attendent leur jugement a frappé le pays de terreur… Et ce sera bien autre chose après le châtiment !…

Deux jours plus tard, pendant que Sylvia était au marché de Mussidan, Daniel continuait un travail de défoncement commencé la veille. Dans la terre fraîchement remuée, les petits se roulaient avec délices, tandis que César, allongé sur le centre, à quelques pas, semblait méditer. L’essarteur était en train d’arracher une souche de brande lorsque le chien se dressa en pattes et signala par ses abois l’approche d’un étranger. Levant lors la tête, Daniel vit venir à travers les bruyères ce même huissier qui avait instrumenté contre lui pour Zélie Cherrier.

Cette fois, l’affaire n’était point aussi grave. Il s’agissait d’une citation à comparaître devant la Cour d’assises pour témoigner dans l’affaire de Badil et autres meurtriers et incendiaires.

À l’aspect de cette chétive demeure et de Daniel lui-même vêtu comme un paysan, l’huissier, quoique