Page:Eugène Le Roy - L’Ennemi de la mort.djvu/79

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Mais, M. de Légé les ayant rejoints, le jeune homme, après les salutations, lui dit gaiement :

— Je viens de croiser vos gens, mon cousin. Ces deux mulets de coffre, avec leurs couvertures à votre chiffre, nous reportent loin en arrière ! Il semble que nous soyons encore au seizième ou au dix-septième siècle.

— Les chemins étant toujours mauvais comme alors, nos moyens de transport sont restés les mêmes, repartit M. de Légé.

— Mon cousin, fit mademoiselle Minna lorsqu’ils eurent repris leur marche, avant-hier, quand vous me parlâtes de nous accompagner, j’ai oublié de vous avertir qu’en passant à la Jemaye nous devions assister à une messe dite à notre intention, et ensuite, dîner chez monsieur le curé.

— Alors, ma cousine, je vous accompagnerai jusqu’à la Jemaye seulement, au lieu d’aller jusqu’au gué de la Risone.

— Excusez-moi, j’ai été un peu étourdie.

— Oh ! je vous en prie, ma cousine !…

— Vous viendrez nous voir quelquefois, Daniel ? demanda-t-elle après un silence.

— Pour vous dire vrai, je ne le pense pas. À Ribérac, vous avez pour visiteurs le sous-préfet, l’archiprêtre, les juges, le receveur des finances et autres personnages de la société, tous gens corrects et un peu « collet monté » peut-être… Imaginez un peu continua le jeune homme en riant, l’effet que je ne manquerais pas de faire dans votre salon, avec mes bottes, ma redingote de cheval, mon gilet chamois et mon feutre à grands bords ! On me prendrait pour un revenant du temps de la Convention !… Je suis allé chez vous, à Légé, dans ce costume, comme