Page:Eugene Simon - La Cité chinoise, 1891.djvu/295

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rétablie, voilà que le fiancé perd sa grand’mère ; d’où le délai qui nous a conduits jusqu’à présent. Nous avons même beaucoup abrégé, car il aurait dû être de vingt-sept mois ; mais comme nous ne sommes que de petites gens dont les gestes n’ont pas d’importance, nous avons pensé que trois cents jours étaient suffisants. Les esprits des ancêtres nous pardonneront, et j’espère bien que cette fois, ma petite-fille ne tardera pas à s’appeler Mme Kou-Ouang-Ché[1]. — Je l’espère aussi, Ouang-Ming-Tse ; d’autant plus que cette attente doit sembler longue aux jeunes gens. Se sont-ils déjà vus ? — Quand ils étaient enfants, oui, mais pas depuis dix ans. — Pas du tout ? — Je ne crois pas, à moins qu’ils ne se soient aperçus une fois ou deux. — En ce cas, il est possible qu’ils ne se reconnaissent même pas ? — C’est probable. » C’était probable, en effet ; je ne l’ignorais pas. Vingt fois au moins, j’avais en vain cherché à me faire rendre compte des motifs d’une coutume si étrange ; car il n’arrive pas toujours que deux fiancés aient eu la chance de se rencontrer dans leur première enfance. Le plus souvent ils ne se sont jamais vus. Indifférence ou précaution, le fait était resté mystérieux ; mais, à cause de cela même, je m’obstinais à en trouver l’explication. Je voulus donc faire une nouvelle tentative. « Mais, grand-père, si les deux futurs allaient ne pas se plaire ! — Pourquoi ne se plairaient-ils pas, Si-Lao-Yé ? — Voyons, Ouang-Ming--

  1. La femme ne perd pas le nom de sa famille en prenant celui de son mari ; elle l’y ajoute.