Page:Eugene Simon - La Cité chinoise, 1891.djvu/323

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de l’eau et de l’engrais qu’il a constamment sous la main, on pense bien que le paysan chinois s’inquiète peu d’assolements, de rotations, d’alternances et en général de tout système destiné à laisser plus ou moins reposer la terre après l’avoir épuisée, et à l’épuiser après l’avoir laissée reposer. Toute cette ruse, toute cette science lui sont inutiles ; sa justice et sa dévotion lui en tiennent lieu. Parce qu’il est juste envers la terre, la terre est sans caprices pour lui. Depuis des siècles, les mêmes champs portent deux fois par an les mêmes récoltes de riz ou de blé ; les autres plantes sont au moins aussi épuisantes ; elles se succèdent de six en six semaines ; et après chacune, l’homme retrouve sa terre aussi vaillante et aussi docile qu’auparavant. Parce qu’il lui est dévoué, il la possède comme personne ne la posséda jamais, comme jamais amant ne posséda sa maîtresse.

Enfin, il est un dernier service que la petite culture, et plus spécialement le repiquage, rendent aux Chinois. Ils leur permettent d’introduire dans leurs cultures un certain nombre de plantes annuelles empruntées à des climats plus chauds. Rien n’est plus simple. Il suffit de calculer l’époque du semis de ces espèces exotiques de façon à n’en faire la transplantation qu’au moment où la saison aura ramené la quantité de chaleur et de lumière[1] nécessaire à leur floraison et à leur fructifi-

  1. Peut-être est-il bon de faire remarquer ici que les Chinois ne distinguent pas les climats par les différences de température mais par les quantités de lumière. Ils ont des climats de 13 heures, de 13 heures et demie, de 14 heures, de 14 heures et demie de 15 heures, etc., c’est-à-dire des contrées où l’espace de temps entre le lever et le coucher du soleil est de 12, 13, 14 heures, etc.