Page:Eugene Simon - La Cité chinoise, 1891.djvu/84

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

faible lueur de justice et de bon sens éclaire l’esprit des castes privilégiées, soient qu’elles jugent habile et politique de détacher de la masse des travailleurs les savants, les lettrés et les artistes, qui ajoutent à la force de leurs réclamations, on crée pour eux la catégorie des arts libéraux. Mais le travail manuel n’en est que plus encore considéré comme servile. A l’heure qu’il est, cette distinction est loin d’être effacée des idées et des faits. Le moindre résultat d’une aussi funeste théorie, c’est de décourager du travail les ouvriers et les paysans. Tous n’ont qu’un but, qu’un rêve: se délivrer du travail. Pour l’atteindre, ils ne reculent devant aucun sacrifice, et, s’ils ne réussissent pas pour eux-mêmes, ils veulent du moins, en mourant, emporter l’espoir que leurs enfants seront plus heureux.

Mais ce dogme maudit du mépris du travail a eu bien d’autres conséquences, et il ne serait pas difficile de montrer que c’est de lui que viennent les guerres, les crimes, les violences de toutes sortes qui déshonorent encore aujourd’hui les sociétés européennes.

Cependant, toute l’humanité n’a point versé dans une semblable erreur. Il s’est trouvé un peuple chez lequel, grâce à l’absence de toute religion surnaturelle, la civilisation, fondée sur des principes naturels, a non seulement échappé aux castes et aux autres causes de dissolution que renferment les civilisations du reste du monde, mais est devenue tellement puissante, que toutes les tentatives religieuses, commerciales et militaires de ces civi-