Page:Euripide, trad. Leconte de Lisle, I, 1884.djvu/230

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la sienne à ses yeux. — Salut ! Déjà les ténèbres m’enveloppent ! — Et tous deux exhalèrent en même temps leur malheureuse vie. Et la mère, voyant cette calamité, vaincue par la douleur, arracha l’épée du cadavre et accomplit une action horrible, car elle s’enfonça le fer à travers la gorge et tomba entre les deux chers morts en les serrant l’un et l’autre dans ses bras. Alors une contestation s’éleva entre les armées. Nous soutenions que mon maître avait vaincu, et eux soutenaient que c’était Polyneikès, et les chefs étaient divisés. Et les uns disaient que Polyneikès avait le premier frappé de la lance, et les autres que la victoire n’appartenait à aucun des deux morts. Pendant ce temps Antigonè s’éloigna de l’armée ; et ils se ruèrent au combat. Par une heureuse prévoyance, la race de Kadmos était restée sous le bouclier, et nous nous jetâmes aussitôt sur l’armée argienne non encore en armes. Et nul ne soutint l’attaque, et les fuyards emplirent la plaine, et le sang des cadavres tombés sous les lances coulait à torrents. Après que nous eûmes vaincu, les uns élevèrent en trophée une statue à Zeus, les autres enlevaient les boucliers des Argiens tués, et nous emportâmes les dépouilles dans la Ville. Et d’autres, avec Antigonè, ont porté ici les trois cadavres, afin que leurs amis se lamentent. Tel a été ce combat, très heureux et très malheureux à la fois pour la Ville.




LE CHŒUR.

Cette calamité de la demeure royale ne nous est plus révélée seulement par les oreilles ; car nous pouvons contempler, devant les demeures, les trois cadavres de