Page:Euripide, trad. Leconte de Lisle, I, 1884.djvu/292

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

aux Muses. Et je dis que ceux d’entre les hommes qui n’ont point connu les noces et n’ont point engendré d’enfants, sont plus heureux que ceux qui en ont eu. En effet, ceux qui sont sans enfants, dans leur ignorance de ce que les fils apportent de douleur et d’amertume aux hommes, n’en ayant point, sont affranchis de beaucoup d’angoisses. Pour ceux qui ont une chère postérité d’enfants dans leurs demeures, je les vois consumés par les soucis pendant toute leur vie : d’abord, la tâche de les élever honnêtement, puis l’existence assurée qu’il faut leur laisser, et, par surcroît, enfin, le doute de savoir si on se donne ces peines pour des bons ou pour des méchants, ce qui est incertain. Et je dirai le dernier des maux qui frappe tous les mortels : en supposant même qu’on leur donne d’abondantes richesses et qu’ils parviennent à la puberté, et qu’ils soient excellents, la mort les arrache à leurs parents et les emporte dans le Hadès. Pourquoi donc, au milieu de tant de douleurs, les Dieux infligent-ils aux hommes la plus amère de toutes à cause de leurs enfants.




MÈDÉIA.

Amies, depuis longtemps anxieuse des événements amenés par la fortune, j’attends de savoir comment s’accomplira là-bas ce que j’ai tenté. Mais je vois venir un des serviteurs de Iasôn. Son souffle haletant indique qu’il va nous annoncer quelque nouveau malheur.

LE MESSAGER.

Ô toi, qui as commis un crime horrible et impie, Mèdéia, fuis, fuis ! ne néglige ni char naval, ni char terrestre !