Page:Euripide, trad. Leconte de Lisle, I, 1884.djvu/504

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lâche quand il fallait combattre en face du casque et de la lance. Non ! si tu es né de moi, ô fils, tu ne feras pas cela. Ne vois-tu pas que la patrie, qu’on raille comme imprudente, regarde ses railleurs d’un œil farouche ? Car elle s’accroît dans les dangers. Mais les Villes timides qui végètent obscurément, restent obscures par excès de crainte. Ne viendras-tu pas en aide, ô fils, aux morts et à des femmes malheureuses qui manquent de secours ? Je ne crains pas pour toi si tu pars pour une cause juste ; et, voyant le peuple de Kadmos, déjà victorieux, jeter un autre coup de dés, je suis rassurée, car les Dieux ont coutume de changer toutes choses.

LE CHŒUR.

Ô toi qui m’es très chère, tu as bien parlé pour lui et pour moi, et c’est une double joie !

THÈSEUS.

Mère, les paroles que j’ai dites contre celui-ci sont justes et j’ai exprimé mon sentiment sur ses actions coupables, mais je comprends ce que tu me conseilles et que ma nature n’est pas de fuir les dangers ; car j’ai acquis, parmi les Hellènes, par beaucoup d’actions glorieuses, la réputation de chasser les pervers. Il ne m’est donc point permis de me refuser à cette tâche. Que diraient, en effet, les hommes qui m’envient, quand toi, ma mère, qui crains pour moi, tu m’ordonnes la première de tenter cette entreprise ? J’irai, je racheterai ces cadavres, d’abord à l’aide de la persuasion, sinon, par la force des armes et à l’aide des Dieux. Mais je désire que cela soit décidé par toute la Cité, et elle le voudra, si je le veux. En permettant au peuple d’en délibérer, je le rendrai plus favorable.