Page:Euripide - Théâtre, Artaud, 1842, tome 2.djvu/176

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sont devenus la pâture des vautours, et Troie a subi le joug de l'esclavage.

ANDROMAQUE.

O ma patrie ! ô infortunée ! je te pleure en te quittant.

LE CHOEUR.

Tu vois maintenant ta fin déplorable.

ANDROMAQUE.

[603] Et la demeure où je devins mère. O mes enfants abandonnés, votre mère, en perdant sa patrie, vous perd aussi ! Quel deuil, quelles lamentations ! Les larmes naissent des larmes dans notre maison. Ceux qui sont morts perdent du moins le sentiment de leurs maux !

LE CHOEUR.

Combien sont doux aux malheureux les pleurs, les accents plaintifs et les chants de douleur!

ANDROMAQUE.

O mère du vaillant Hector, dont la lance fut fatale à tant de Grecs, vois-tu ce spectacle?

HÉCUBE.

Je vois l'ouvrage des dieux, qui élèvent ce qui est humble, et renversent ce qu'on croit élevé.

ANDROMAQUE.

On m'emmène avec mon fils, comme un butin : ce qui est né sur le trône tombe dans l'esclavage par les vicissitudes du sort.

HÉCUBE.

Dure loi de la nécessité ! c'est ainsi qu'on vient d'arracher Cassandre de mes bras.

ANDROMAQUE.

Hélas ! hélas ! un autre Ajax s'est donc rencontré pour ta fille ? Mais un autre coup encore t'a frappée.

HÉCUBE.

[620] Mes maux sont sans nombre et sans mesure ; ils se disputent la possession de mon coeur.

ANDROMAQUE.