Page:Euripide - Théâtre, Artaud, 1842, tome 2.djvu/401

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veur, et imite les vertus de ton père. La plus belle des gloires pour un enfant né d’un père vertueux est d’imiter les vertus de son père.

Théonoé.

La pitié m’attendrit au récit de tes infortunes, et toi-même tu es digne de pitié. Mais je désire entendre Ménélas à son tour défendre sa vie.

Ménélas.

Tu ne me verras pas tomber à tes genoux ou répandre des larmes ; par une lâcheté je souillerais la gloire que j’ai acquise devant Troie. On dit cependant qu’un homme de cœur peut verser des larmes dans le malheur ; mais cette faiblesse, quelque belle qu’on la dise, ne saurait prévaloir sur ma résolution courageuse. Mais, si tu crois devoir sauver la vie d’un étranger qui vient réclamer son épouse, rends-la-lui et sauve ses jours. Si tu rejettes ma prière, j’ai appris dès longtemps à supporter le malheur ; mais toi, on t’accusera de cruauté. Pour une prière digne de moi et propre à toucher ton cœur, je puis la faire entendre sur le tombeau de ton père. « Ô vieillard qui reposes sous cette pierre, rends-moi, je t’en conjure, l’épouse que Jupiter t’a confiée. La mort t’empêche de me satisfaire, mais ta fille ne souffrira pas que ta gloire soit ternie ; car ce que je demande est en son pouvoir. » Dieu des enfers, j’implore aussi ton secours, moi dont le bras enrichit ton empire et t’offrit pour Hélène de nombreuses victimes : ou rends-les à la vie, ou fais que celle-ci, la digne héritière des vertus et de la piété de son père, rende une épouse à mon amour. Enfin, si vous me l’arrachez, je vous dirai ce qu’elle a passé sous silence : sache-le, vierge, nous nous sommes promis par serment de combattre d’abord ton frère : il faut que lui ou moi succombe. Voilà qui est bien simple. S’il refuse le combat, s’il veut