Page:Europe (revue mensuelle), n° 123, 03-1933.djvu/123

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Macovei sauta de sa place :

— Qu’est-ce qu’elle vient de dire ? « Petit piment ? » Ti-i-i ! Que c’est triste pour un homme d’avoir « un tout petit piment ».

— « Pour un homme », dites-vous que c’est triste ? répliqua Tassia. Je vous demande pardon ! C’est la femme, qui a le droit de s’en plaindre. Madame avait raison !

Tout le « Bureau » riait en se tenant les côtes. Encouragés, quelques clients grossiers se mirent à lancer des plaisanteries de mauvais goût. Léonard les fit taire en leur montrant une voiture de maître qui venait de s’arrêter devant le « Bureau ». Il se leva majestueux, pour recevoir une grande dame qui entrait. Grave, presque revêche mais élégante, distinguée, elle ne salua que le patron :

— Bonjour, Monsieur Léonard.

— Je vous baise les mains, Madame Stoenesco. Veuillez prendre place. Il y a longtemps qu’on ne vous a pas vue. J’espère que vous êtes toujours contente de notre Amélie.

— Oui… Cette dernière femme de chambre me convient. Il n’en va pas de même avec les cuisinières. Je n’arrive pas à mettre la main sur une bonne.

— Pourtant, Madame, la Polonaise…

— …Certes, elles savent presque toutes leur métier, mais, voilà, elles me volent toutes !

Les cuisinières présentes firent une grimace, vite effacée. Léonard, confus, songea longuement :

— Qui pourrais-je vous recommander, Madame ? Je n’ai en ce moment rien qui soit digne de votre maison. Attendez, je veux regarder bien.

C’est dans son gros registre qu’il regarda, mais ce n’était qu’un truc. Places et domestiques on les savait par cœur. La consultation du registre ne faisait que sauver les apparences et permettait de gagner du temps.

La dame vint en aide :

— Si je ne me trompe, vous avez un agent, un de ces nouveaux croyants, appelés adventistes.

— Oui, Madame. Vassili.

— Eh bien ne pourrait-il pas me dénicher quelque chose