Page:Evariste Huc - Empire chinois ed 5 vol 1.djvu/193

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cèrent sur la route qu’il leur avait indiquée. Le premier et le plus célèbre fut le P. Matthieu Ricci, qui entra en Chine vers la fin du seizième siècle. Ce pays où les idées religieuses, il faut en convenir, ne jettent que difficilement de profondes racines, avait laissé entièrement périr les semences de la foi chrétienne qu’il avait reçues dès les premiers temps, et surtout au moyen âge. A part l’inscription retrouvée à Si-ngan-fou, et dont nous avons parlé plus haut, il n’y avait aucune trace du passage des anciens missionnaires et de leurs prédications. Il ne s’était pas même conservé dans les traditions du pays le plus léger souvenir de la religion de Jésus-Christ. Triste peuple que celui sur l’esprit duquel les vérités chrétiennes ne font que glisser !

Tout était donc à recommencer ; mais le P. Ricci avait tout ce qu’il fallait pour cette grande et difficile entreprise. « Le zèle courageux, infatigable, mais sage, patient, circonspect, lent pour être plus efficace, et timide pour oser davantage, devait être le caractère de celui que Dieu avait destiné à être l’apôtre d’une nation délicate, soupçonneuse et naturellement ennemie de tout ce qui ne naît pas dans son pays. Il fallait ce cœur vraiment magnanime, pour recommencer tant de fois un ouvrage si souvent ruiné, et savoir profiter des moindres ressources. Il fallait ce génie supérieur, ce rare et profond savoir, pour se rendre respectable à des gens accoutumés à ne respecter qu’eux, et enseigner une loi nouvelle à ceux qui n’avaient pas cru jusque-là que personne pût leur rien apprendre ; mais il fallait aussi une humilité et une modestie pareille à la sienne pour adoucir à ce peuple superbe le