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manifestation de la veille nous avait fait monter si haut dans l’opinion publique qu’on n’eût pas à remarquer sur notre passage la plus légère inconvenance. Le peuple encombrait les rues ; mais son attitude était bienveillante et presque respectueuse. On s’écartait sans tumulte devant nos palanquins, et chacun ne paraissait préoccupé que de l’étude de notre physionomie, pendant que nous nous efforcions d’avoir la pose la plus majestueuse possible et la plus conforme aux rites.

Nous étions au mois de juin, la plus belle saison pour la province de Sse-tchouen. Le pays que nous parcourions était riche et d’une admirable variété ; nous rencontrions tour à tour des collines, des plaines et des vallons arrosés par des eaux ravissantes de fraîcheur et de limpidité. La campagne était dans toute sa splendeur, les moissons mûrissaient de toute part, les arbres étaient chargés de fleurs ou de fruits qui déjà commençaient à se gonfler de sève. De temps à autre l’air, délicieusement parfumé, nous avertissait que nous traversions de grandes plantations d’orangers et de citronniers.

Dans les champs, et sur tous les sentiers, nous retrouvions cette laborieuse population chinoise, incessamment occupée d’agriculture ou de commerce ; les villages avec leurs pagodes au toit recourbé, les fermes environnées d’épais bouquets de bambous et de bananiers, les hôtelleries et les restaurants échelonnés le long de la route, les nombreux petits marchands qui vendent aux voyageurs des fruits, des fragments de canne à sucre, des pâtisseries à l’huile de coco, des potages, du thé, du vin de riz et une infinité d’autres friandises chinoises, tout cela était pour nous comme des rémi-