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QUATRIÈME PARTIE.

Et, à mesure que le temps s’écoulait, la situation se tendait davantage ; l’angoisse de l’heiress augmentait, parce qu’elle devinait les progrès de la sourde colère qui bouillait au fond du cœur de Jermyn.

Ce n’était plus, à cette heure, l’enfant qu’elle dominait naguère et qui se courbait, docile, au moindre signe de sa volonté souveraine. La passion l’avait fait homme tout à coup ; il était terrible et implacable.

Chaque fois que son regard se tournait, sournois et sombre, vers la porte qui défendait seule le sommeil du major blessé, l’heiress sentait l’épouvante étreindre son âme. Elle demandait à Dieu le retour des autres Mac-Diarmid, qui étaient les ennemis de Mortimer, mais qui auraient pitié de ses larmes, à elle, et qui l’exauceraient, suppliante et agenouillée.

Tandis que Jermyn, elle le devinait, n’aurait point d’oreille pour sa prière ; elle ne pouvait qu’aggraver le péril en essayant de le fléchir, et c’est pour cela qu’elle tâchait de rester froide, car elle n’écoutait plus en ce moment la voix de la fierté, elle se fût courbée avec joie ; c’était de force qu’elle arrêtait les larmes au seuil de sa paupière : elle eût voulu pleurer et s’humilier.