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LE BOSSU.

touffu. Il s’asseyait au pied d’un arbre et je m’endormais dans ses bras.

» Il veillait, lui, écartant de moi les mosquitos et les lances ailées. — Parfois, je faisais semblant de dormir, et je le regardais à travers mes paupières demi-closes.

» Ses yeux étaient toujours sur moi ; en me berçant, il souriait.

» Je n’ai qu’à fermer mes yeux pour le revoir ainsi, mon ami, mon père, mon noble Henri ! — L’aimez-vous à présent, ma mère ?

» Avant le sommeil ou après, selon mon caprice, car j’étais reine, le dîner était servi sur l’herbe. Un peu de pain noir dans du lait.

» Souvenez-vous de vos plus délicieux festins, ma mère. Vous me les décrirez, à moi qui ne les connais pas. Je suis bien sûre que nos fêtes valaient mieux que les vôtres. Notre pain, notre lait ! le dictame, trempé dans l’ambroisie ! La joie du cœur, les bonnes caresses, le rire fou à propos de rien, les chers enfantillages, les chansons, que sais-je ?

» Puis le jeu encore : il voulait me faire forte et grande.

» Puis, le long de la route, au retour, la calme causerie, interrompue par cette fleur qu’il fallait conquérir, par ce papillon brillant qu’on voulait