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LE BOSSU.

orgueilleuse sous les splendides éblouissements de son ciel.

» La misère est mauvaise au cœur de l’homme. Je sais cela quoique je sois bien jeune. Cette chevaleresque race de vainqueurs des Maures est déchue. Les fils du Cid sont menteurs, voleurs et lâches. De toutes leurs anciennes et illustres qualités, ils n’ont gardé que l’orgueil.

» Un orgueil de comédie, un orgueil poltron, drapé dans les lambeaux : l’orgueil de ces spadassins pour rire, que Polichinelle met en fuite avec son bâton.

» Le paysage est merveilleux, les habitants sont tristes, paresseux, plongés jusqu’au cou dans la malpropreté honteuse. — Cette belle fille qui passe, poétique de loin et portant avec grâce sa corbeille de fruits, ce n’est pas la peau de son visage que vous voyez, c’est un masque épais de souillures.

» Il y a des fleuves pourtant ; mais l’Espagnol n’a pas encore découvert l’usage de l’eau. Son corps frileux fuit les ablutions. — Ce paradis tout planté d’orangers en fleurs a d’autres parfums que la fleur d’oranger.

» Quand il y a quelque part cent voleurs de grand chemin, cela s’appelle un village. On nomme un alcade. L’alcade et tous ses adminis-