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LE BOSSU.

s’il lui échappe une douce parole, j’oublie tout cela, ma mère, et je suis heureuse…

» J’ai l’air de me plaindre. N’allez pas croire, ma mère, qu’il me manque quelque chose. — Henri me comble toujours de bontés et de prévenances. S’il est froid avec moi depuis longtemps, peut-on lui en faire un crime ?…

» Tenez, ma mère, une idée m’est venue parfois. J’ai pensé, car je connais les chevaleresques délicatesses de son cœur, j’ai pensé que ma race était au-dessus de la sienne, ma fortune aussi peut-être. Cela l’éloigne de moi. Il a peur de m’aimer.

» Oh ! si j’étais sûre de cela ! comme je renoncerais à ma fortune ! comme je foulerais aux pieds ma noblesse !

» Que sont donc les avantages de la naissance auprès des joies du cœur ? Est-ce que je vous aimerais moins, ma mère, si vous étiez une pauvre femme… ?

» Il y a deux jours, le bossu vint le voir. — Mais je ne vous ai pas parlé encore de ce gnome mystérieux, le seul être qui ait entrée dans notre solitude.

» Le bossu vient chez nous à toute heure, c’est-à-dire chez Henri, dans l’appartement du premier étage. On le voit entrer et sortir : les gens