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LE BOSSU.

Sous la Régence, il ne s’agissait plus de tragédie. L’ombre triste de Mirame dut se voiler pour ne point voir ces fameux petits soupers que le duc d’Orléans faisait, dit Saint-Simon, « en des compagnies fort étranges ; » mais ses théâtres servirent, car la mode était aux filles d’Opéra.

La belle duchesse de Berry, fille du régent, toujours entre deux vins et le nez barbouillé de tabac d’Espagne, faisait partie de l’étrange compagnie où n’entraient, ajoute le même Saint-Simon, « que des dames de moyenne vertu et des gens de peu, mais brillant par leur esprit et leur débauche… On buvait beaucoup et du meilleur… On disait des ordures à gorge déployée, des impiétés à qui mieux mieux, et quand on avait fait du bruit et qu’on était bien ivre, on allait se coucher… »

Mais Saint-Simon n’aimait pas le régent. Si l’histoire ne peut cacher entièrement les regrettables faiblesses de ce prince, du moins nous montre-t-elle les grandes qualités que ses excès ne parvinrent pas à étouffer.

Ses vices étaient à son infâme précepteur : ce qu’il avait de vertu lui appartenait, d’autant mieux qu’on avait fait plus d’efforts pour la tuer en lui. Ses orgies, et ceci est rare, n’eurent point de revers sanglant. Il fut humain ; il fut bon. Peut-être eût-il