Page:Féval - Le chevalier ténèbre, 1925.djvu/173

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s’enchevêtraient de telle sorte que le fameux fil d’Ariane eût été une ressource parfaitement insuffisante pour se diriger au milieu de cet inextricable labyrinthe. Mais, à défaut de fil, Jean Brand, qui s’y était engagé avec Sainte, avait une connaissance exacte et minutieuse du pays. Aussi allait-il d’un pas ferme, changeant de sentier tous les dix pas, mais ne montrant jamais une ombre d’hésitation.

Au bout d’une demi-heure de marche, il s’arrêta.

— Nous voici arrivés, dit-il.

Sainte regarda autour d’elle avec surprise. Elle connaissait ce lieu pour y être venue souvent dans ses promenades, mais elle n’y avait jamais rien découvert qui pût servir d’abri à des êtres humains.

Cet endroit formait à peu près le milieu de la lande. Le terrain s’y affaissait circulairement, de manière à former un large amphithéâtre ou entonnoir, à pente insensible, dont le centre était marqué par un menhir (pierre druidique). Le sol, uni et sans mouvement aucun, ne permettait pas de croire à l’existence d’une caverne cachée ; et l’absence complète d’arbres éloignait toute idée d’un campement en plein air.

— C’est le Trou-aux-biches, dit Sainte, en donnant à ce lieu le nom sous lequel il était désigné dans le pays.

— C’est plutôt le Trou-aux-Chouans, répondit le bedeau. Du moins, à l’heure qu’il est, vous y trouverez plus de chouans que de biches.

Sainte jeta un nouveau regard aux alentours. Elle ne vit rien encore.

Jean Brand écarta alors avec précaution les branches épineuses d’un gigantesque ajonc.

— Passez, dit-il.

Sainte obéit. Aidée par le Chouan, qui, avec une adresse singulière, la préserva de toute piqûre, elle franchit le premier obstacle, et se trouva dans un nouveau sentier, tortueux, étroit, et le long duquel on ne pouvait marcher qu’en se courbant, parce que les