Page:Féval - Le chevalier ténèbre, 1925.djvu/69

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— Trois ans… peut-être quatre ans…

— Vous êtes bien sûr qu’il n’y a pas cinq ans révolus ?

— Parfaitement sûr, mon frère, M. le duc, n’a que vingt-sept ans.

— Et il lui a fallu le temps de manger sa terre : c’est juste… Eh bien ! monsieur le marquis, je suis tout à vous.

— Je ne suis pas sans avoir ouï parler, continua posément Gaston, de la loi hongroise qui règle les rémérés légaux après vente forcée. Seulement, les auteurs magyares ne sont point traduits en France, et leur latinité ne m’a pas paru toujours très claire… Mayruth fixe à quatre ans le délai du rachat facultatif et de plein droit…

— Mayreuth, s’écria le baron en restituant l’orthographe du nom, est un âne pédant et entêté qu’on ne lit plus. La cour d’Autriche, en réservant à la Hongrie le bénéfice de son ancienne législation, l’a codifiée. Le délai du réméré légal et de plein droit est de cinq ans et un jour, à partir de la date des enchères publiques… et il n’est pas sans exemple que le délai ait été prorogé sur demande adressée à la chancellerie, avec pièces à l’appui…

À son tour, Gaston s’inclina en cérémonie.

— Monsieur le baron, dit-il en prenant congé, je vous prie de recevoir tous mes remerciements.

— Ah çà ! marquis, s’écria sa mère comme il revenait vers elle, me ferez-vous la grâce de me dire quel sermon en trois points vous lui avez péché ?

— Madame, répondit Gaston avec un sourire que la princesse ne lui avait jamais vu, je commence mes études diplomatiques. Ces conseillers privés, croyez-moi, sont bien difficiles à tourner.

— Il n’a pas voulu vous répondre ?

— Si fait.

— Dites alors, s’écria la princesse avec, pétulance, dites donc vite !