Page:Féval - Les Belles-de-nuit ou les Anges de la famille, tome 2, 1850.djvu/239

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

C’était le petit Francin qui avait parlé. Il était tremblant et tout pâle.

— Oui… oui… poursuivit-il en baissant les yeux, c’est moi qui ai dit le premier De profundis pour le salut de leurs âmes… car je les ai vues cette nuit… et j’ai bien reconnu qu’elles étaient mortes.

Le père Géraud avait fendu la presse et tenait l’enfant par le bras.

— Tu les as vues ?… balbutia-t-il.

Le petit paysan frémissait de tous ses membres.

— C’était ce matin, une heure avant le jour… dit-il, j’allais au marais chercher nos chevaux… j’ai vu quelque chose de blanc qui se remuait au pied de l’aune où l’on amarre le grand bac de Port-Corbeau… J’avais peur, mais j’ai pensé tout de suite aux demoiselles… Oh ! je les ai bien reconnues !… Elles portaient les mêmes robes que le soir du bal !… Elles étaient là toutes deux agenouillées au pied de l’arbre, et il me semblait qu’elles creusaient la terre… J’ai fait du bruit en me sauvant, et quand je me suis retourné pour voir encore, elles avaient disparu…

On entamait la dernière hymne sous la porte de l’église. Les paysans se turent et mêlèrent leurs voix émues à celles des prêtres.