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Pernola atteignit sa boîte à cigares, pendant que le père Preux le regardait en secouant la cendre de sa pipe.

— Fumez-en un pour vous changer, dit l’Italien, qui offrit sa boîte ouverte.

Le Poussah en choisit deux et les mit dans sa poche, disant :

— Je colle ça à nos dames, en Bourse.

Et il rebourra sa pipe avec ses grosses mains engorgées qui tremblaient.

— Je parlais de l’agent no 17, reprit-il, parce que je l’ai rencontré ces jours-ci nez à nez.

— Comment s’appelait-il donc, déjà, cet auxiliaire ? demanda le comte en ouvrant un mignon canif pour couper le bout de son cigare.

— Chanut… Vincent Chanut, parbleu !

Le comte frotta une allumette.

— C’est juste, fit-il, je l’avais oublié.

— La mémoire est une drôle de chose ! dit pour la seconde fois le Poussah. À l’époque, ce Vincent Chanut était un tout petit mouchard. Maintenant il a quitté l’administration, mais c’est égal : il ne vit pas de ses rentes. Savez-vous qu’il vous filait de près, le jour où vous apportâtes les soixante mille francs chez le docteur Strozzi ? Hein, cette Laura-Maria ! quel beau brin de fille ! Ma parole, ça fait plaisir de se rappeler comme ça les bonnes farces de l’ancien temps !

Pernola regardait le bout de sa botte d’un air placide.

— Oui, dit-il, ça fait grand plaisir.