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— J’étais sûre de cela, ma chérie murmura la marquise qui la regardait avec une admiration toute féminine. Mais, mon Dieu ! êtes-vous assez jeune ! dès le matin ! et belle ! Je serais presque votre mère, savez-vous ?… J’ai un service à vous demander, un grand service. Asseyez-vous là, près de moi. Voulez-vous être mon bon ange ?

Tout à l’heure, pendant qu’elle attendait, une sorte d’affaissement avait succédé à son excitation, mais la fièvre la reprenait et précipitait ses paroles.

Laure se mit auprès d’elle. Sa réponse fut un témoignage d’empressement dévoué. Leurs fauteuils se touchaient presque, et néanmoins Mme de Sampierre rapprocha le sien.

— Chérie, dit-elle en baissant la voix, je vous préviens que je vous prends au mot. Pas de préambule ! Deux fois déjà, vous entendez, deux fois, vous m’avez parlé de lui…

— Plutôt cent fois que deux ! s’écria la baronne. Ah ! certes, nous avons causé de lui plus de cent fois ! S’il y a au monde une chose qui m’ait intéressée, c’est l’admirable entêtement de votre amour maternel. Ma raison me défendait de partager vos espérances, mais que peut la raison contre le cœur ? Et souvent je me suis surprise à rêver, comme vous rêvez vous-même, le retour de ce fils bien-aimé.

La marquise l’attira vers elle et la baisa au front.

— Ce n’est pas cela, dit-elle encore. Vous êtes une âme d’élite et vous avez toujours écouté ce que tant d’autres appellent mes radotages. Mais j’ai dit ce que je