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il va sans dire qu’au moment où il se retrouva en face du passage Choiseul, le bruit de la voiture avait cessé de se faire entendre.

— Elle est loin, si elle court encore, pensa-t-il. Le vieux connait son affaire et ne néglige aucune précaution. Il ne me reste plus qu’à suivre son conseil et je vais me coucher.

Vincent Carpentier, comme ceux qui sont pauvres, avait choisi son logis loin du centre. Il demeurait derrière l’École militaire, quartier beaucoup plus désert alors qu’aujourd’hui et où les loyers étaient à très-bas prix. Renonçant à l’espoir de rejoindre la voiture dans le dédale des rues de Paris, il prit le chemin des Champs-Élysées.

Nous devons dire au lecteur qu’il n’avait pas, à proprement parler, défiance du colonel. Le colonel se présentait à son esprit comme un être bienfaisant, engagé par certaines circonstances inconnues dans une mystérieuse entreprise. Ce qui le tenait, c’était l’étrange et invincible fantaisie qui prend chacun de nous en face d’une charade dont le mot habilement déguisé, se dérobe au premier effort de notre intelligence.

Chaque homme, en pareille occurrence, établit une gageure avec lui-même, et plus la solution fuit, plus on s’acharne à la poursuivre.

Une fois dans la grande avenue des Champs-Élysées, Vincent se mit à regarder tout autour de lui,