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LES CONTES DE NOS PÈRES.

eût fallu aller jusqu’à Versailles pour trouver une autre et aussi noble assemblée.

L’arrivée du président de Montméril et de sa fille fit événement, non-seulement pour MM. de Saint-Maugon, mais pour tout le reste de l’assistance. M. de Montméril, en effet, doyen des présidents à mortier du parlement breton, était fortement soupçonné de mauvais vouloir à l’encontre du gouvernement de Sa Majesté. Il fomentait, au sein des états, cette opposition hardie, et jusqu’alors victorieuse, qui repoussait l’intendant royal de l’impôt, et prétendait conserver à la province le droit d’administrer elle-même ses revenus. Hors des états, son rôle n’était pas moins actif, mais devenait, disait-on, plus coupable. Beaucoup affirmaient qu’il n’était point étranger à cette révolte partielle, peu offensive, mais obstinée, des paysans de la haute Bretagne, qui ne demandaient rien moins que l’annulation du pacte d’union consenti par la duchesse Anne, malgré son peuple. Madame de Sévigné, dans ses lettres, traite fort sévèrement cette insurrection ; les historiens la citent à peine pour mémoire, et ne se donnent point souci de discuter la légitimité de ses motifs. Ceci ne nous doit pas surprendre, attendu que les insurgés furent vaincus.

Mais l’Irlande aussi peut être vaincue. À Dieu ne plaise qu’il nous vienne à l’esprit une comparaison injurieuse pour la France ! La France fit de chaque Breton un Français, tandis que l’Angleterre, ce gigantesque comptoir qui spécule sur tout, sur le sang et sur les sueurs, ne prit l’Irlande que pour la pressurer. Néanmoins la Bretagne était un peuple, et l’on doit concevoir qu’il se puisse trouver parmi un peuple des esprits pour ne vouloir point comprendre qu’une femme ait le droit de capitaliser leur nationalité, afin de l’apporter