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LE PETIT GARS.

pointe de son épée, et y introduisit de force le petit coffret. Cela fait, il posa la mèche soufrée tout à côté de la lampe.

— La première pierre qui branlera, dit-il, sera mon signal… Ah ! que c’eût été un glorieux moment sans cette femme, et pourquoi est-elle venue pour empoisonner la joie de ma dernière heure !

À ce moment, Henriette tressaillit et s’éveilla. L’enfant se prit à sourire en étendant ses bras vers la meurtrière. M. de Graives, pour ne point voir ce spectacle qui le navrait, reprit son livre de prières. Henriette se leva doucement, et s’approcha de l’ouverture. — Le petit Alain souriait toujours.

C’est que, au dehors, sous le branchage épais des arbres du parc, une voix douce, voix d’enfant ou de femme, chantait les couplets d’une chanson connue de tout habitant du pays de Vannes. Elle disait ces naïves paroles, si populaires dans les bruyères morbihannaises :


C’est au pays de Bretagne
Qu’on fait de jolis sabots ;
Tenez vos petits pieds chauds,
Ma belle brune…
Et vous, gars à marier,
Cherchez fortune !


M. de Graives n’entendait rien et lisait son livre d’Heures.

— Janet ! prononça bien bas Mme de Thélouars qui tâchait de passer sa tête à travers la meurtrière.

La voix cessa de chanter.

— Janet Legoff ! répéta Henriette.

— Qui m’appelle ? dit la voix avec une expression d’étonnement inquiet.