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LE PETIT GARS.

de solde, quant à leurs soldats, qui n’avaient pas de souliers, ils venaient chercher un trésor, comme les garçons de caisse de la Banque vont toucher un bordereau. Peu leur importait la destination de ce trésor ; ils étaient instrument depuis les pieds jusqu’à la tête ; on se servait d’eux en ce temps comme d’une arme bien trempée, apte également aux actions héroïques et aux vols de grand chemin.

En entrant au château, Bertin et Thomas secouèrent, comme deux barbets, leurs grotesques tricornes et les draperies déteintes de leurs écharpes tricolores, en se jetant réciproquement de fauves regards. Puis, ayant débouclé le ceinturon de leurs inoffensives épées, afin de se mettre à l’aise, ils procédèrent à la visite du manoir. Autre désappointement : le manoir était vide. Une fois la porte principale forcée, nul obstacle ne les arrêta plus. C’était bien mauvais signe. On avait sans doute abandonné le château ; on avait peut-être emporté le trésor.

— Citoyen, dit le lieutenant Morest à son représentant, nous aurons été prévenus.

Le capitaine Jolly en dit autant à son surveillant.

Ce commun déboire rapprocha un instant les deux rivaux. Ils se consultèrent, et le résultat de leur conférence fut d’ordonner de nouvelles recherches.

— Courage, citoyens ! s’écria Bertin ; le vieux ci-devant se cache quelque part, et je prends sur moi, au nom de la République, — une et indivisible, — de promettre une paire de sabots toute neuve au défenseur de la patrie qui découvrira ce vil ennemi du salut public !

On ne donnait pas tous les jours une paire de sabots aux défenseurs de la patrie. Cette généreuse promesse ranima