Page:F.Douglass, Vie de Frédéric Douglass esclave Américain, 1848.djvu/128

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

vous vous en tireriez plus mal que la dernière fois. » Le combat avec M. Covey fut une circonstance décisive, et pour ainsi dire la crise de ma carrière d’esclave. Il ralluma en moi la flamme mourante de l’amour de la liberté, et ranima dans mon cœur le sentiment de ma dignité d’homme. Il fit revenir cette confiance en moi-même qui avait disparu, et m’inspira de nouveau la résolution d’être libre. Le transport de joie que mon triomphe m’avait causé, était une ample compensation à tout ce qui pouvait s’ensuivre, à la mort même. Il n’y a que l’esclave qui a repoussé par la force le bras sanglant de son oppresseur, qui puisse comprendre la profonde satisfaction que j’éprouvais. Ce que je sentais ne ressemblait à rien de ce que j’avais senti auparavant. C’était comme une glorieuse résurrection du tombeau de l’esclavage au ciel de la liberté. Mon énergie, longtemps abattue, se releva, ma lâcheté disparut, une audace qui allait jusqu’à la provocation, prit sa place, et ma résolution fut définitivement arrêtée. À partir de ce moment-là, je pouvais bien être un esclave quant à la forme, je ne pouvais plus être un esclave en réalité. Je n’hésitai pas à donner à entendre que tout homme blanc qui se proposerait de me fustiger aurait aussi à me tuer. Dès lors il ne m’arriva