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SUR LES ANIMAUX UTILES À L’AGRICULTURE

lui mettent la gueule en sang, il s’y refuse obstinément et se contente d’aboyer. À l’abri sous son enveloppe d’aiguilles, le hérisson fait la sourde oreille à ces vaines menaces et reste coi. Si le chien, surexcité par son maître, revient à la charge, le hérisson a recours à un dernier expédient de guerre qui rarement manque son effet : il lâche son urine infecte, qui suinte de l’intérieur de la boule et vient humecter l’extérieur. Rebuté par l’odeur de la bête apuantie, piqué au nez par les dards, le chien le plus ardent renonce à l’attaque. L’ennemi parti, le hérisson se déroule avec prudence et se hâte de trottiner vers quelque sûre retraite.

VIII

L’HIBERNATION

Paul. — Nos chauves-souris s’alimentent exclusivement d’insectes ; le hérisson en fait sa principale nourriture, bien qu’il lui arrive de chasser un plus fort gibier, ou même de manger des fruits. Or, en hiver, les insectes à l’état parfait manquent ; la plupart sont morts après avoir pondu leurs œufs, et les rares survivants sont blottis, à l’abri du froid, dans des cachettes où il serait bien difficile de les trouver. D’autre part, les larves, espoir des futures générations, sont engourdies loin des regards ; sous terre, dans le tronc des vieux arbres, au fond des réduits inaccessibles : le ver blanc, pour fuir les gelées, est descendu dans le sol à plusieurs pieds de profondeur. Plus de hannetons pour l’oreillard, plus de papillons crépusculaires pour la noctule et la pipistrelle, plus de scarabées pour le hérisson. Que vont devenir ces mangeurs d’insectes ?

Jules. — Ils périront de faim.

Paul. — Ils périraient tous, sans la providentielle disposition que je vais essayer de vous faire comprendre.

Vous savez le proverbe : Qui dort dîne, proverbe de haute vérité dans sa naïve expression. Eh bien, le hérisson, les chauves-souris et d’autres le mettent en pratique comme s’ils étaient versés dans les secrets de la sagesse humaine. N’ayant