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SUR LES ANIMAUX UTILES À L’AGRICULTURE

notre corps pour y remplir son rôle merveilleux. Avant tout, nous vivons d’air ; la nourriture ordinaire ne vient qu’en seconde ligne. Le besoin des aliments n’est éprouvé que par intervalles assez longs ; le besoin d’air se fait éprouver sans discontinuer, toujours impérieux, toujours inexorable. Que l’on essaye un moment de suspendre son arrivée dans le corps, en lui fermant ses voies, la bouche et les narines : presque aussitôt la suffocation vous gagne, et l’on sent qu’on périrait infailliblement si cet état se prolongeait un peu.

L’air n’est pas seulement de la plus pressante nécessité pour l’homme ; il l’est aussi pour tous les animaux, depuis le dernier ciron à grand’peine visible jusqu’aux géants de la création. La physique fait à ce sujet une expérience frappante. On met un animal vivant, un oiseau, par exemple, sous une cloche de verre d’où l’on retire l’air peu à peu à l’aide d’une pompe spéciale nommée machine pneumatique. À mesure que l’air disparaît, aspiré par la pompe, l’oiseau chancelle, se débat dans une anxiété horrible à voir et tombe mourant. Pour pou qu’on tarde à faire rentrer l’air dans la cloche, le pauvret est mort, bien mort ; rien ne pourra le rappeler à la vie. Mais si l’air rentre à temps, son action le ranime. Enfin une bougie allumée que l’on met sous la cloche s’éteint aussitôt si l’on retire l’air. Il faut de l’air à l’animal pour vivre, il en faut à la bougie pour brûler.

Ce que j’ai maintenant à vous dire vous expliquera la cause de cette absolue nécessité de l’air pour l’entretien de la vie. — L’homme et les animaux d’une organisation supérieure, les mammifères et les oiseaux, ont une température qui leur est propre, une chaleur qui résulte non des circonstances extérieures, mais du seul exercice de la vie. Sous un soleil brûlant comme au milieu des frimas de l’hiver, sous le climat torride de l’équateur comme sous le climat glacial des pôles, le corps de l’homme possède une température de trente-huit degrés, et celle température ne saurait baisser d’un rien sans danger de mort. La chaleur naturelle des oiseaux va jusqu’à quarante-deux degrés en toute saison, sous tous les climats.

Comment se fait-il que cette chaleur se maintienne toujours la même ? et puis d’où peut-elle venir, si ce n’est d’une espèce de combustion ? Il y a, en effet, en nous une combustion permanente ; la respiration l’alimente d’air, le manger l’alimente de combustible. Vivre, c’est se consumer, dans l’acception