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RÉCITS DE L’ONCLE PAUL

bandes innombrables, qui sont un fléau pour la contrée visitée. Leurs destructeurs par excellence sont les oiseaux de proie nocturnes, comme le prouve la présence des crânes, des os et des peaux de campagnols dans les pelotes rejetées par ces oiseaux après le travail de la digestion. Quelques oiseaux de proie diurnes, les buses surtout, en font également curée. Il n’est pas rare de trouver dans le jabot d’une buse jusqu’à dix campagnols et plus.

Le campagnol souterrain est beaucoup plus rare en France. Il diffère du premier par son pelage gris et noirâtre, par sa taille un peu moins forte, ses yeux très petits. Il en diffère surtout par les mœurs. Le premier vit dans les champs, surtout dans les champs de céréales ; le second vit dans les prairies et les jardins potagers. Il se nourrit de différents légumes : céleri, artichauts, carottes, pommes de terre, cardons. Rarement on le voit hors de ses galeries. À cause de son habitude de se tenir de préférence sous terre, on l’a nommé le campagnol souterrain.

Le campagnol amphibie est vulgairement connu sous le nom de rat d’eau. On le distingue aisément du rat noir, dont il a les dimensions, par son pelage roux, sa queue courte, à peu près de la longueur de la moitié du corps, sa tête plus large et plus obtuse. Il se creuse des terriers sur la berge des cours d’eau, des fossés, des marais, où il se nourrit principalement de racines, sans dédaigner les petits poissons et les écrevisses quand il peut en faire capture. Il nage et plonge très bien. Il pénètre quelquefois dans les potagers humides, où il cause les mêmes dégâts que le campagnol souterrain, et dans les jardins fruitiers, où il ronge la base des jeunes arbres.

Le campagnol lemming ne se montre jamais dans nos régions. Il habite les bords de la mer glaciale, en Norwège et en Laponie. Je vous en dirai quelques mots, à cause de ses curieuses migrations, dont notre campagnol des champs nous offre un exemple bien affaibli. Le lemming, avec sa queue très courte et velue, sa tête grosse, son corps trapu, a toute l’apparence d’un petit lapin. Son pelage est roux, marbré de noir et de brun.

À l’approche des froids rigoureux, et parfois sans cause apparente, les lemmings abandonnent leur demeure habituelle, la haute chaîne des montagnes de la Norwège, pour