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portance vitale du point atteint par l’Aranéide, bien plus que l’atrocité du venin, qui nous rendra compte de cette mort soudaine.

Quel est ce point ? Avec les Bourdons, impossible de le reconnaître. Ils entrent dans le terrier, et le meurtre s’accomplit loin des regards. D’ailleurs, la loupe ne trouve sur le cadavre aucune blessure, tant sont fines les armes qui l’ont faite. Il faudrait voir directement les deux adversaires aux prises. J’ai plusieurs fois essayé de mettre dans le même flacon une Tarentule et un Bourdon en présence. Les deux animaux mutuellement se fuient, aussi inquiets l’un que l’autre de leur captivité. J’en ai gardé vingt-quatre heures en présence, sans agression ni d’une part ni de l’autre. Plus soucieux de la prison que de l’attaque, ils temporisent, comme indifférents. L’expérience est toujours restée sans succès. J’ai réussi avec des Abeilles et des Guêpes, mais le meurtre s’est accompli de nuit et ne m’a rien appris. Je trouvais le lendemain les deux hyménoptères réduits en marmelade sous les mandibules de la Lycose. Une proie faible, c’est une bouchée que l’Araignée se réserve pour le calme de la nuit. Une proie capable de résister n’est pas attaquée en captivité. Les soucis du prisonnier refroidissent les ardeurs du chasseur.

Le cirque d’un large flacon permet à chaque athlète de se retirer à l’écart, respecté de son adversaire, également respecté. Amoindrissons l’arène, rétrécissons l’enceinte. Je plonge Bourdon et Tarentule dans une éprouvette dont le fond n’offre place que pour un seul. Une vive mêlée éclate sans résultat sérieux. Si le Bourdon est en dessous, il se couche sur le dos, et de ses pattes