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Semblables de forme et de coloration, toutes les deux possèdent pareil talent d’architecte ; et ce talent se traduit par un ouvrage de haute perfection qui charme le regard le plus novice. Leur domicile est un chef-d’œuvre. Cependant les Eumènes pratiquent le métier des armes, peu favorable aux arts ; de l’aiguillon, ils piquent une proie ; ils font butin, ils rapinent. Ce sont des hyménoptères ravisseurs, approvisionnant leurs larves de chenilles. L’intérêt doit être vif de comparer leurs mœurs avec celles de l’opérateur du ver gris. Si le gibier reste le même, des chenilles de part et d’autre, peut-être l’instinct, variable avec l’espèce, nous réserve-t-il de nouveaux aperçus. D’ailleurs l’édifice bâti par les Eumènes mérite à lui seul examen.

Les hyménoptères déprédateurs dont nous avons jusqu’ici tracé l’histoire sont merveilleusement versés dans l’art du stylet ; ils nous étonnent par leur méthode chirurgicale, qui semble avoir été enseignée par quelque physiologiste à qui rien n’échappe ; mais ces savants tueurs sont des ouvriers de peu de mérite dans le travail du domicile. Qu’est la demeure, en effet ? Un couloir sous terre, avec une cellule au bout ; une galerie, une excavation, un antre informe. C’est œuvre de mineur, de terrassier, parfois vigoureux, jamais artiste. Avec eux, le pic ébranle, la pince détache, le râteau extrait et jamais la truelle ne bâtit. Avec les Eumènes, voici venir de vrais maçons, qui édifient de toutes pièces en mortier et pierres de taille, qui con-

    rapporter à chacune d’elles le nid correspondant. Les mœurs étant les mêmes, cette confusion est sans inconvénient dans l’ordre d’idées de ce chapitre.