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SOUVENIRS MATHÉMATIQUES

ment j’entame mon binôme. Mon auditeur s’intéresse aux lettres combinées. Pas un instant il ne se doute que, révolutionnaire scandaleux, je mets la charrue avant les bœufs et débute par où nous aurions dû finir. J’agrémente mes explications de quelques menus problèmes, haltes où l’esprit se recueille et prend des forces pour un nouvel élan.

Nous cherchons ensemble. Discrètement, afin de lui laisser le mérite de la trouvaille, je lui soumets les éclaircies qui me viennent. La solution se trouve. Triomphe de mon écolier ; de ma part aussi triomphe, mais tacite, dans les replis de la conscience, qui me dit : « Tu comprends, puisque tu parviens à faire comprendre. » Pour l’un et pour l’autre, l’heure passa vite, très agréable. Mon jeune homme me quitta satisfait. Je ne l’étais pas moins ; j’entrevoyais une originale façon d’apprendre.

Les ingénieux et faciles arrangements du binôme me donnèrent le loisir d’attaquer mon livre d’algèbre par le vrai commencement. En trois ou quatre jours j’avais fourbi mes armes. De l’addition et de la soustraction, rien à dire : c’est d’une simplicité qui s’impose à la première lecture. Avec la multiplication les choses se gâtèrent. Il y a là certaine règle des signes affirmant que moins multiplié par moins donne plus. Ai-je pâti sur cette espèce de paradoxe !

Là-dessus, paraît-il, le livre s’expliquait mal, ou plutôt employait méthode trop abstraite. J’avais beau lire, relire, méditer, le texte obscur gardait son obscurité. C’est là le mauvais côté du livre en général, il dit ce qui est imprimé, rien de plus. Si vous ne comprenez pas, nul conseil de sa part, nul essai dans une autre