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SOUVENIRS ENTOMOLOGIQUES

Pour combler un peu, sur le tard, cette énorme lacune, je suis respectueusement revenu à ces bons vieux livres qu’il est d’usage d’écouler chez le bouquinisle à peine défraîchis. Vénérables feuillets, annotés du crayon dans mes veillées du jeune âge, je vous ai retrouvés, et plus que jamais vous êtes mes amis.

Vous m’avez appris qu’une obligation s’impose à qui manie la plume : c’est d’avoir quelque chose à dire, capable de nous intéresser. Si le sujet est de l’ordre des sciences naturelles, l’intérêt est presque toujours assuré ; le difficile, le très difficile, est de l’émonder de ses épines et de le présenter sous un aspect avenant.

La Vérité, dit-on, sort nue du fond d’un puits. Soit, mais reconnaissons qu’elle gagne à se trouver décemment vêtue. Elle réclame, non les falbalas tapageurs empruntés au vestiaire de la rhétorique, mais au moins une feuille de vigne. Seuls, les géomètres ont le droit de lui refuser ce modeste costume. En des théorèmes, la clarté suffit.

Les autres, le naturaliste surtout, ont le devoir de nouer, avec quelque élégance, une tunique de gaze autour des reins de la vérité.

Si je dis : « Baptiste, donne-moi mes pantoufles, » je m’exprime dans un langage clair, peu riche de variantes. Je sais très bien ce que je dis et ma parole est comprise. D’aucuns prétendent, et ils sont nombreux, qu’en tout cette rudimenlaire méthode est la meilleure. Ils parlent science avec leurs lecteurs, comme ils parleraient pantoufles avec Baptiste. Une syntaxe de Cafre ne les effarouche pas. Ne leur parlez pas de la valeur d’un terme choisi, mis en sa vraie place ; parlez-leur encore moins d’une construction cadencée, sonnant à peu près