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L’ARAIGNÉE LABYRINTHE

Plane vers les bords, autant que le permettent les inégalités du soutien, la nappe, par degrés, s’excave en cratère et représente assez bien le pavillon d’un cor de chasse. La partie centrale est un gouffre conique, un entonnoir dont le col, graduellement rétréci, s’enfonce vertical dans le fourré de verdure et plonge à un empan de profondeur environ.

À l’entrée du tube, ténébreux coupe-gorge, se tient l’Araignée, qui nous regarde non bien émue de notre présence. Elle est grise, modestement parée sur le thorax de deux rubans noirs, et sur le ventre de deux galons où alternent des points les uns blanchâtres, les autres bruns. À l’extrémité du ventre, deux petits appendices mobiles forment une sorte de queue, détail assez étrange chez une Araignée.

La nappe cratériforne n’est pas de même structure dans toute son étendue. Sur les confins, c’est une trame évanouissante de fils clairsemés ; plus avant vers le centre, le tissu devient légère mousseline, puis satin ; plus loin, sur les rapides pentes de l’évasement, c’est un lacis de mailles grossièrement losangiques. Enfin le col de l’entonnoir, station habituelle, est formé d’un solide taffetas.

L’Araignée ne cesse de travailler à son tapis, pour elle estrade d’investigation. Toutes les nuits, elle y vient, le parcourt, surveillant ses pièges, prolongeant son domaine et l’accroissant de nouveaux fils. Le travail se fait avec la soie constamment appendue aux filières et constamment extraite à mesure que la bête chemine. Le col de l’entonnoir, plus souvent parcouru que le reste de la demeure, est donc pourvu de la tapisserie la plus épaisse. Par delà sont les pentes du cratère, lieux très